Figure proéminente du jazz latin, Rafael Zaldivar lance Rumba (2022), une cinquième offrande musicale du pianiste et compositeur d’origine cubaine qui le voit poursuivre et pousser à de nouveaux sommets sa fusion unique d’influences afro cubaines traditionnelles et contemporaines. Capturant l’essence de la forme artistique donnant son titre à l’album, le pianiste explore la rumba sous toutes ces facettes, dépassant les dimensions physiques et vocales traditionnellement associées au genre pour faire émerger de nouvelles possibilités.
Rafael Zaldivar – Rumba avec Terri Lyne Carrington, Kurt Rosenwinkel, Miguel Zenón, Ingrid Jensen et Amado Dedeu Garcia
Pour réaliser ce tour de force, Raphael Zaldivar retient les services d’une impressionnante brochette d’artistes, incluant Terri Lyne Carrington (batterie), Kurt Rosenwinkel (guitare), Miguel Zenón (sax alto), Ingrid Jensen (trompette) et Amado Dedeu Garcias (voix, percussions). Sans conteste un des meilleurs albums québécois de jazz de l’année.
Eleggua, A Pray, Baila Mi Changui
Ode à la divinité yoruba du même nom, l’album s’ouvre sur Eleggua, un rythme cubain bercé par le synthétiseur éthéré de Zaldivar que l’on retrouve également sur quatre autres morceaux en alternance avec le piano acoustique. Les rythmes vifs et ondulants de A Pray donnent lieu à de beaux échanges entre le piano et le saxophone Miguel Zenón, ce dernier adoptant pour le coup un son rond et feutré bien éloigné des sonorités cuivrées auxquelles il nous a habitués jusqu’ici. Toutes deux portées par les rythmes frénétiques de Terri Lyne Carrington et Amado Dedeu Garcia, Baila Mi Changui met en valeur la pleine virtuosité du pianiste et son don certain pour les lignes angulaires, alors que la seconde projette des couleurs chatoyantes des Caraïbes, invoquant des influences classiques et folkloriques.
Dolor de Amar, Crying for Cuba, Tiempos de Amar, Obbatala
Le jeu unique de Kurt Rosenwinkel est mis en valeur sur Dolor De Amar, tissant des toiles harmoniques singulières de pair avec le synthé de Raphael Zaldivar, évoquant par moment le Pat Metheny Group. Crying for Cuba demeure le morceau le plus lumineux de l’album, avec ses deux trompettes, sax alto (Luis Deniz) et deux sax ténors, qui se combinent pour atteindre un point culminant. La ballade Tiempos de Amar fait appel aux sonorités apaisantes et toutes en finesse de la trompettiste émérite Ingrid Jensen, pour ensuite entrer en territoire ostensiblement cubain avec le chant traditionnel Obbatala, marquant la fin d’un excellent album qui ne peut qu’asseoir, ici comme ailleurs, le statut de Rafael Zaldivar sur la planète jazz.
Eleggua / A Pray (avec Miguel Zenón) / Interlude / Baila Mi Changüí (avec Terri Lyne Carrington) / Guajiro (avec Terri Lyne Carrington) / Two Words / Short Blues / Dolor de Amar (avec Kurt Rosenwinkel) / Alma / Crying for Cuba / Tiempos de Amar (avec Ingrid Jensen) / Obbatala
Arnaud G. Veydarier : arnaudgveydarier@gmail.com / Facebook / twitter
Arnaud G. Veydarier est guitariste, a étudié la musicologie à l’Université de Montréal et nourrit un intérêt prononcé pour le jazz, la musique contemporaine et les liens entre musique et développement urbain. Il est également impliqué au Centre de musique canadienne du QC. Pour voir tout ses bons plans et chroniques d’albums, c’est ici
