Tariq Amery et Brooklyn Passport @ Dièse Onze

Charlotte Desilets Primeurs 6 avril 2025 | 0

Tariq Amery et Brooklyn Passport @ Dièse Onse - Charlotte a vu!

Ce soir, samedi le 29 mars, je vais écouter le multi-instrumentiste Tariq Amery et Brooklyn Passport jouer au Dièse Onze pour la représentation de 21 h 30. Avec Luke Glanovits (vibes), Nick Pura (basse), Jarred Chase (batterie) et Ojiik (saxophoniste invité).

Une soirée porteuse d’un bonheur spécial

C’était une journée difficile; j’arrive là fatiguée et, assise au bout du bar, je commande un verre d’eau (au grand déplaisir du serveur qui travaille fort pour ramasser son pourboire). Je lève les yeux, un peu attendrie par les petites lampes rouges qui diffusent une lumière apaisante, et je reconnais un sourire, sur le coin opposé du comptoir. C’est le visage rieur de mon amie Félicia, qui par hasard sortait de sa caverne universitaire pour profiter d’une bonne soirée de jazz avec une copine. Soudain mes épaules se sont senties moins lourdes et j’ai su que la soirée allait être porteuse d’un bonheur spécial.

Tariq Amery, flûtiste et saxophoniste

Sympathique barbu à la chemise pastel, les lunettes fumées sur la tête et les bracelets au poignet, Tariq Amery est flûtiste et saxophoniste de formation, né à London (ON) et présentement établi à Montréal. Deux grands percussionnistes à la chevelure bouclée, qui me paraissent un instant être Jimmy Page et Robert Plant de Led Zeppelin, entrent sur scène avec lui: ce sont le vibraphoniste Luke Glanovits et le batteur Jarred Chase. Nick Pura complète la formation à basse électrique, et Ojiik, saxophoniste ottavien et soliste invité, se joint à eux au premier tiers de la performance.

Grosse Vibe !

Jarred Chase brise le silence en premier. La chaine sur sa cymbale frétille alors qu’il crée tout un étagé de sons qui s’ajoutent à celui de la coutellerie des spectacteurs. Tariq débute à la flûte en jouant une mélodie méditative, digne d’une retraite de pleine conscience dans les montagnes du Vermont. Sa douceur lyrique m’inspire les ombres étranges que le soleil donne au matin quand il est bas, de même que les mélodies languissantes que son confrère à la basse lui répond. Puis, sans que je ne m’en aperçoive, le groupe nous fait vivre à la fois des ambiances de bebop cuisant, de rock progressif et de hip hop qui me renvoie aux jam sessions emballées du Turbo Haus. “GROSSE VIBE”, comme on dit!

Nick Pura rythme de façon brillante – Luke Glanovits surprends par ses solos excitants

Quoique je ne me remets jamais complètement du son magistral du vibraphone, que je voyais être joué en vrai pour la première fois, je remarque dès la première pièce l’ingéniosité avec laquelle Tariq réagit musicalement à la résonance de l’instrument, jouant par son souffle et son embouchure avec les différents effets de vibrato que Luke Glanovits enclenche. Tariq Amery possède une créativité et une écoute admirables qui mettent à profit ses capacités virtuoses autant à la flûte traversière qu’au saxophone ténor.

Je suis aussi enchantée par le jeu de Nick Pura, qui rythme de façon brillante les pièces improvisées, en ponctuant chaque section de pauses qui ne font que relancer la prochaine avec plus d’énergie. Quant à Luke Glanovits, le prodige ne cesse de me surprendre par ses solos excitants, et me fait beaucoup rire au nombre de fois qu’il échappe l’une de ses quatres baguettes, pris par tant de fougue dans son improvisation.

Brooklyn Passport et les douanes

Ce quintette s’étant réuni au Dièse Onze pour un soir seulement, l’ensemble a été nommé Brooklyn Passport, en l’honneur du périple routier au cours duquel son leader a traversé les Adirondacks dans la pluie battante jusqu’aux douanes américaines pour se rendre compte qu’il avait oublié son passeport chez Jarred à New York… le genre de péripéties qui lie des amis pour une vie, et qui enrichit l’espèce de complicité magique qui les unit sur scène.

Le dialogue et la spontanéité – les nombreuses qualités de la musique improvisée

Mon gentil voisin de tabouret, qui me partageait plus tôt son intérêt à étudier la solitude créée par la technologie chez les humains, se dit ébahi par la communication et l’imagination qui a permis aux musiciens de jouer un concert à 100% improvisé ce soir. Cela démontre pourquoi le dialogue, la spontanéité et l’acceptation des imprévus ne sont que quelques-unes des nombreuses qualités de la musique improvisée que j’aimerais voir mises de l’avant dans la société. Ce concert était donc une autre preuve des milles bénéfices de se réunir ensemble pour apprécier de la musique, et me donne envie de remercier tous les propriétaires de salles de concerts ou de restos-bars qui permettent à ces rassemblements d’avoir lieu.

Ayant à cœur la juste valorisation des créateurs musicaux, Tariq se tient loin des plateformes de diffusion numérique. Il a toutefois son album Indefinity (2017) sur Bandcamp, ainsi qu’un nouvel album en collaboration avec le saxophoniste Ryan Devlin que vous pourrez entendre en fin 2025 ou début 2026.

https://tariqamerygroup.bandcamp.com/album/indefinity

Débutant une résidence hebdomadaire les jeudis en mai au Issan Wineroom, Tariq jouera aussi avec le groupe Joy Lapps à la Maison de la culture Parc-Extension ce 12 avril à Montréal. Il vous invite ensuite à le voir à Québec pour une série de concerts de son cru au Bar St-Angèle les 24 et 25 avril, en plus d’un concert très spécial le jeudi 23 avril Chez Temporel. Ne manquez pas votre chance!!