Samara Joy @ FIJM (28 juin) Charlotte a vu !


Samara Joy, la chanteuse la plus éblouissante que j’aie jamais vue, a chanté hier soir (28 juin) à la Maison symphonique avec sept musiciens brillants. Une performance étourdissante.



Sur Round Midnight, on est immédiatement percutés par la qualité des musiciens, qui jouent comme une seule entité


Le concert débute avec un arrangement du saxophoniste Kendrick McCallister tiré de l’album Linger Awhile (2022). C’est une version hyper-arrangée de Round Midnight, où l’on est immédiatement percutés par la qualité des musiciens, qui jouent comme une seule entité. La voix de la chanteuse est saisissante et profonde, ce qui contraste avec la candeur joyeuse avec laquelle elle interprète la ballade. Plutôt que la délicatesse que je lui connaissais dans son enregistrement, c’est une force irrépressible qui sort de la chanteuse quand elle ouvre la bouche, un son immense. On sent la fébrilité générale quand arrivent le soli énergique et le solo du pianiste Connor Rohrer en temps double. C’est comme si on venait de monter dans le wagon d’un train new-yorkais qui filait à toute allure vers la gloire. La fin de la pièce me trouve essoufflée, mais aux anges.



Samara Joy y fait l’étalage de sa musicalité inouïe et de sa technique vocale hors pair


Suivent un hommage à Betty Carter avec Beware My Heart, arrangé par le trompettiste Jason Charos, et un à Ella Fitzgerald (et Duke Ellington) avec I Got It Bad And That Ain’t Good, arrangé par le tromboniste Donavan Austin. Samara Joy y fait l’étalage de sa musicalité inouïe et de sa technique vocale hors pair. Mêlant les riffs et runs pentatoniques des reines du soul, les envolées lyriques des mezzo-sopranos et le paraphrasé inventif des emblèmes du jazz, c’est un style vocal complètement nouveau qu’elle nous présente.


Les arrangeurs démontrent une créativité débordante avec des pièces en constante évolution, des accents, des arrêts et des changements d’ambiance. Je suis abasourdie par leur génie d’instrumentation et leur exécution si polie. Je vois dans chacune de leurs notes parfaites et de leurs nuances en montagnes russe un idéal de technique musicale, mais j’ai parfois le sentiment de regarder défiler des scènes sur Tik Tok. Je sature rapidement.


Radieuse et intègre, Samara Joy témoigne au public de sa reconnaissance de chanter pour une deuxième année au Festival, qui est l’un de ses favoris. Elle mentionne son cheminement fulgurant depuis son premier album et sa graduation de l’Université SUNY Purchase, et nous avoue qu’elle n’a pas chanté souvent pour un public aussi nombreux.


La pression et la recherche d’un équilibre


Après You Stepped Out of a Dream, munie de solos de piano et de trompette très expéditifs, elle nous parle de la pression qu’elle sent de toujours prendre la bonne décision, depuis que sa carrière a décollé, et de sa recherche d’un équilibre. Elle balbutie “…take your time, you have time”, et enchaîne avec Peace of Mind/Dreams Come True. Dans cet arrangement dramatique à la Billy Strayhorn, j’adore voir Joy se connecter aux paroles qu’elle nous chante et sentir qu’elle nous raconte son histoire. Ses ornementations vocales sont encore plus touchantes quand elles naissent d’une émotion.


La pièce suivante, It’s The Little Things met en avant la batterie (Evan Sherman) et le saxophone. Leurs solos respectifs ainsi que leurs échanges sont très conversationnels. Dans un concert très écrit et orchestral comme celui-là, les parties en temps simple, où la section rythmique peut improviser et où tout le monde peut respirer, sont très satisfaisantes.


Left Alone, No More Blues et Aquarius – un abandon collectif


Les dernières pièces du concert sont mes préférées, car je sens un abandon collectif. Le bassiste sourit. La chanteuse danse et s’amuse. Left Alone, bijou composé par Billie Holiday, débute a cappella. La voix de Samara remplit à elle seule la maison symphonique, et dans le minimalisme des arrangements je rencontre enfin sa sensibilité à elle. Finalement No More Blues est une grande fête où Samara Joy nous fait cadeau d’un solo de scat qu’on n’aurait jamais voulu voir terminer. Le rappel, Aquarius, libère la chanteuse de tous ses fardeaux, dévoile son héritage blues majestueux et clôt le spectacle dans une euphorie inoubliable.



Comme démontré hier, Samara Joy et son groupe ont le potentiel de captiver l’imaginaire du monde entier, et ce que je leur suggère comme prochaine étape de développement du spectacle est de réfléchir au message qu’ils veulent véhiculer par leurs instruments extraordinaires.  Un meilleur fil conducteur et un peu plus d’espace pour exister.


Samara Joy a également remporté le prix Ella Fitzgerald du FIJM 2025


Maurin et Samara


Samara Joy – voix
Kendric McCallister – sax ténor/clarinette basse
David Mason – saxophone alto / flute
Jason Charos – trompette
Donavan Austin – trombone
Paul Sikivie – contrebasse
Connor Rohrer – piano
Evan Sherman – batterie


Programme de la soirée


1. Round Midnight – arrangé par Kendrick McCallister – spotify
2. Beware My Heart – arrangé par Jason Charos
3. I Got it Bad and That Ain’t Good – arrangé par Donavan Austin
4. You Stepped Out Of A Dream – version studio YouTube
5. Peace of Mind/Dreams come True – spotify
6. Little Things
7. Left Alone – arrangé par Donavan Austin
8. No More Blues – Today Show sur YouTube
9. Aquarius


Samara Joy @ Festival International de Jazz de Montréal
Samedi le 28 juin 2025 @ la Maison symphonique


Charlotte DésiletsCharlotte Désilets : charlotte.desilets@gmail.com

La chanteuse de jazz et comédienne Charlotte Désilets nous raconte les passionnants concerts et ses rencontres avec les artistes de la grande famille du jazz.


Photos : Benoit Rousseau


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